Expositions à Aire-sur-la-Lys depuis Saint-Omer

  • Le 17/05/2019

Historique du cycle d’expositions 2009/2017 à la galerie du Bailliage d’Aire-sur-la-Lys et perte des moyens à l’occasion du changement de communauté de communes de la CCPA du Pays d’Aire à la CAPSO du Pays de Saint-Omer. cycle-d-expositions-2009-2017-a-la-galerie-du-bailliage-d-aire-sur-la-lys-2.pdf (121.38 Ko)

De 2009 à 2017, l’équipe principalement bénévole de la Galerie du Bailliage a mis en place 33 expositions (dont une sur « L’histoire des fortifications d’Aire sur la Lys » par Karl-Michael Hoin). Il nous paraissait légitime que la qualité de nos expositions, le nombre de visiteurs entre 2500 et 3000 visiteurs par année, leurs coûts réduits bien qu’assurant l’indemnisation des artistes (cession de droits d’exploitation des œuvres, frais de transport, etc.), aient pu nous permettre de continuer malgré l’absorption d’Aire-sur-la-Lys dans notre nouvelle communauté de communes (CAPSO) sous l’égide de Saint-Omer. Les décideurs n’en ont pas décidé ainsi, où sont-ils maintenant ? qui sont-ils ? L’éloignement du centre des décisions nous a éloignés de notre propre ville. Nous avons pu espérer que ce regroupement de communes, si le respect des forces vives locales avait prévalu, nous aurait donné plus de moyens d’action pour la diffusion de nos expositions. En bénéficiant par exemple des médiateur.trice.s culture de la CAPSO nous aurions pu attirer beaucoup plus des jeunes de nos écoles et pourquoi pas plus largement de l’Audomarois. Nous aurions pu accueillir des artistes proposés par la CAPSO, nous aurions pu participer à des actions thématiques communes? nous aurions pu, nous y avions crû... un instant seulement. Le masque de la bienveillance s'efface vite quand les clefs ont changé de main. Le mépris des petits n’est pas une politique de grands politiques. Il les écarte d'une mission essentielle : faire sens avec toutes les géographies de  leur territoire et leurs citoyens. Pas avec une équipe regroupée sur un centre, pas avec un secteur dominant dans une géographie hiérarchisée. En démocratie le vrai pouvoir consiste à laisser vivre et à soutenir ce pouvoir positif des citoyens à créer et développer du sens commun au plus près de chez eux et non d'écraser les initiatives par la centralisation sur des structures autocentrées. Suite à la perte des moyens financiers, ligne budgétaire (6000 euros) disparue dans le passage à la CAPSO, et au refus de nous déléguer les moyens humains de l'ancien Office de Tourisme d'Aire-sur-la-Lys du Pays d'Aire transformé en pôle d'information touristique sous la direction de l'Office de Tourisme et des Congrès du Pays de Saint-Omer, notre équipe bénévole a décidé de jeter l'éponge.

L’ancien Office de Tourisme d’Aire-sur-la-Lys a organisé des expositions d’artistes dans la salle haute du Bailliage pendant de nombreuses années. En 2009 la commission artistique de l’Office de Tourisme a engagé une nouvelle étape en transformant cet espace en galerie et en faisant appel à des artistes de référence dans des champs artistiques plus larges en s’ouvrant en particulier à la bande dessinée et au film d’animation. Le préalable de ce nouveau cycle était de définir clairement une rémunération des artistes conformément aux textes réglementaires et aux chartes. Cette rémunération pour cession de droits de représentation était un gage de crédibilité et de respect des artistes plasticiens qui animaient un monument public exceptionnel de notre ville.  Pour les futures expositions organisées par Saint-Omer ou d'autres acteurs, nous espérons que les équipes municipales et communautaires qui se succéderont auront toujours à cœur de rémunérer les artistes qu’elles ont choisi ou choisiront d'exposer et de prendre en charge leurs frais. Si des décideurs institutionnels choisissent des artistes pour animer des lieux publics, ils doivent l’assumer jusqu’à rémunérer et indemniser ces artistes. Si ces mêmes décideurs ouvrent la porte en disant - Ce n'est pas un choix, rentre qui veut! c’est une autre histoire. Ce n’est pas celle que nous avons racontée de 2009 à 2017.

Nous avons choisi en commission des artistes qui ont une renommée et qui sont pour certains exposés dans des galeries et des musées régionaux, nationaux et internationaux. Charles Gadenne : Musée Rodin à Paris, La Piscine à Roubaix, Musée de l’estampe à Gravelines, etc. Jean Pierre Réchin : Muséum d’histoire naturelle de Paris, etc. Casimir Krakowiak : Musée des Beaux-arts de Valenciennes, etc. Jean Parzy : Palais des Beaux-arts de Lille, membre de L’Atelier de la monnaie, etc. Jacques Declercq : Musée de la Dentelle à Calais, etc. John Christoforou : Le LAM de Villeneuve d’Ascq, le LAAC de Dunkerque, etc. Jean Baptiste Dumont à la galerie Elysées à New York, galerie Claudine Legrand à Paris, etc.

Ou comme pour les auteurs de bande dessinée et les réalisateurs de film d’animation qui sont reconnus dans leur milieu ou d’un plus large public. Franck Dion nominé au César du meilleur film d’animation en 2013, etc. Rémi Mabesoone auteur de « Cafougnette » héros du Nord, etc. François Desbordes : Gallimard, Nathan, Muséum d’histoire naturelle de Paris, etc. Philhoo : Glénat, etc. Nicolas Liguori : Les Films du Nord, etc. Fred Vervisch auteur à succès des éditions Sandawe et sa plateforme de crowdfunding.

Mais nous exposions aussi des artistes le plus souvent régionaux moins ou peu connus, mais dont l’œuvre nous parait exprimer un regard de qualité, original et engagé dont nous tentions d’être les porteurs. Barbara Delepouve d’Aire-sur-la-Lys : reportage photographique sur le camp des gens du voyage à Lille. Maude : Photographies entre peinture et abstraction sans trucages. Jacqueline Hurdebourcq et ses tapisseries contemporaines. Serge Contesse plus connu comme grand reporter, Chef du service photo de la Voix du Nord, mais dessinateur, peintre « des marionnettes de la vie » dont nous avons présenté une belle sélection, Guy Gervais et ses photos entre réalisme et abstraction des coupoles de lumière des mosquées d’Istanbul. Jozef Bonnot peintre et céramiste entre Art singulier et Art tout court. Jacques Mayeux et ses peintures-empreintes grands formats.

Nous avons aussi parrainé le lancement en dédicace du premier livre illustré, Globule l’extraterrestre, édité par le dessinateur airois Géry Denisselle. En 2017 nous avons exposé des illustrations de six artistes dont Géry Denisselle de la maison d’édition Le Téètras magic.

Ces expositions étaient, de par la vocation de l’Office de Tourisme, destinées à attirer des visiteurs extérieurs de la ville et de ses environs et à offrir aux touristes un point de visite supplémentaire de qualité dans un lieu classé d’exception, mais elles présentaient aussi aux habitants du secteur d’Aire sur la Lys des œuvres d’artistes que beaucoup n’auront peut-être pas par ailleurs l’occasion de connaître ou de découvrir avec l’angle original que nous pouvions mettre en scène : Pierre Faucher , ses cahiers de recherche sur l’enfermement et les camps concentrationnaires posés sur des supports au sol. Laurent Houssin , des planches non publiées, des croquis de recherches, un puissant vrac. Antonio Buondelmonte  - Création de gravures originales à l’occasion de l’exposition. Jean Claude Ourdouillie et ses sculptures de verre avec ses fantômes suspendus, une mémoire, un hommage aux mineurs de notre région. Kader Benamer et ses photographies urbaines, abstraites, brillantes et colorées ou le rien devient tout.

Seule une galerie d’Art (galerie Pierre Vandrotte) était encore présente sur le territoire d’Aire sur la Lys, elle ferme cette année 2019, la galerie Nowiew a tenu deux ans. Il y a quelques expositions d’Art qui sont proposées dans différents lieux (Collégiale, Area, Chapelle Saint-Jacques, Hôtel de Ville, le Bastion), mais de manière très ponctuelle sans programmation permanente de fond et le plus souvent sans pouvoir aller vers un accrochage et une scénographie adaptés, ces lieux n’étant pas aménagés en supports et éclairage pour la mise en scène des expositions. L’équipe de bénévoles dans le cadre de l’ancien Office de Tourisme d’Aire-sur-la-Lys a assuré cette permanence et a tenté pendant quelques années d’attirer plus de public, avec cette responsabilité d’être le seul acteur sur le secteur à proposer une programmation variée, régulière, et des artistes de référence. C’était le seul lieu d’exposition dédié, gratuit et ouvert 6 à 7 jours par semaine, parfois à la demande. Il y a un véritable enjeu à maintenir et développer des expositions dans des lieux chargés d’histoire, nous valorisons ainsi le patrimoine et proposons à la modernité de nos artistes contemporains des lieux d’exceptions, des écrins qui sont l’identité profonde de notre ville. Avec des expositions in situ, les habitants ont l’occasion en découvrant ces artistes, d’habiter les trésors architecturaux qui sont la fierté de leur cité, les touristes profitent eux de ces lieux de manière plus intime, plus vivante, ils ont une opportunité supplémentaire de « prendre le temps ». Ces dernières années nous avons proposé entre décembre et janvier/février la Galerie du Bailliage pour des expositions aux écoles primaires et au club Photo d’Aire-sur-la-Lys (centre intergénérationnel).

L’Office à travers la commission artistique a proposé aux artistes qu’elle a invité.e.s, un accompagnement complet pour la promotion (affiches, aides à la visite, carton d’invitation, flyers, kakemonos, contact vers les médias et les écoles, emploi d’une base de données et d’une communication internet, frais de vernissages). Nous réalisions aussi l’impression des éléments d’expositions pour les œuvres numériques non mises en vente ou les supports didactiques. Par ailleurs, l’Office indemnisait l’artiste et lui remboursait ses frais de transport et si nécessaire son hébergement, mais il ne prenait pas en charge la réalisation d’œuvres spécifiques à l’exposition et l’emballage. Les services techniques de la ville étaient parfois sollicités pour le transport des œuvres ou des supports d’expositions, mais le plus souvent, soit les artistes assuraient leur transport, soit c’étaient les membres de la commission artistique. Le lieu était assuré, surveillé (sous surveillance vidéo), chauffé, entretenu par la ville d’Aire sur la Lys. Une salariée de l’Office était plus spécifiquement rattachée au suivi des expositions (équivalent d’un quart temps), même si de fait ce sont les membres permanents de l’Office qui assuraient, selon leur planning, la surveillance pendant les visites ou l’accueil des groupes conjointement aux bénévoles. Pour l’accueil des enfants des écoles primaires, maternelles et du centre de loisirs, nous préparions un questionnaire de visite qui leur permettait de mieux découvrir les œuvres, les techniques, l’artiste, et de s’interroger sur leurs propres perceptions : aimer ou ne pas aimer une œuvre, en parler ou parler de ce qu’on y voit ou ressent, vivre un évènement, une question artistique et humaine, découvrir des techniques. Un écran de téléviseur permettait aussi la diffusion de films ou de diaporamas. Pour Jacques Declercq cela a permis de diffuser pendant l’exposition un reportage dans son atelier, pour Franck Dion les animatiques (story-boards animés) de ses 3 courts-métrages, pour Kader Benamer des œuvres vidéos.

S’il fallait aujourd’hui remettre sur les rails la Galerie du Bailliage avec un programme annuel de qualité, en rémunérant en cession de droits les artistes conformément aux textes réglementaires et aux chartes, à une éthique, il faudrait aussi engager une réflexion sur un aménagement conforme à la sécurité des visiteurs et à l’accès aux personnes à mobilité réduite. Nous avons fait des propositions dans ce sens. Ou alors peut-être pouvons nous envisager un autre lieu de notre patrimoine comme le passage des Hallettes pouvant, après destruction des installations qui le défigurent depuis trop longtemps, devenir un passage des Arts où l’histoire d’Aire sur La Lys serait mise en scène, où un autre espace serait dédié aux expositions d’artistes contemporains. La Galerie du Bailliage pourrait dans ce cas accueillir des annexes de ces expositions (carnets, notes, croquis, etc.), ou des ateliers en lien avec un thème d’exposition comme nous avons pu le faire avec l’illustrateur Rémi Mabesoone. Les lieux emblématiques d’Aire-sur-la-Lys en ont sous la pédale, les Airois aussi. S’il fallait… Dans notre transformation des territoires et des compétences, quel.le acteur.trice public en serait le soutien et la force de décision ? Favorisera-t-il/elle l’initiative locale quand elle pourrait faire, fait ou a fait ses preuves ou bien accentuera-t-il/elle la concentration des pouvoirs avec le risque d’éloigner un peu plus la population de son nécessaire engagement dans le développement et les réseaux d’échanges de sa ville et de ses quartiers. Il est assez étrange de constater que les politiques des villes tentent de réconcilier les citoyens avec leur lieu de vie, alors que certaines créations de communautés de communes de plus en plus grandes leur retirent une partie de l’existant, leurs moyens d’action et de création à partir des richesses des réseaux locaux. Bien sûr dans le même temps en déclarant qu’il faut favoriser l’implication des citoyens dans la vie publique. Il faudrait mieux hiérarchiser dans ces communautés de communes ce qui relève d’une gestion où la taille a du sens et ce qui relève d’actions décentralisées, qualitatives, ouvertes vers l’extérieur, créatrices de lien social qui peuvent tout à fait être en partenariat avec des structures communautaires aux moyens de communication et de médiation plus puissants en particulier vers les touristes et les établissements scolaires, etc. L’un n’empêche pas l’autre. Reconnaître l’autre aux frontières de son territoire, ou dans les sombres replis de sa géographie, c’est pouvoir envisager qu’on le dépossède, c’est aussi pouvoir comprendre qu’on ne peut pas tout maitriser, qu’on ne doit pas tout maitriser, en particulier quand il s’agit d’art et de culture. Est-ce possible quand la taille donne à l’Un ce qu’elle prend à l’Autre, que l’Un puisse faire confiance à l’Autre, aux équipes de terrain en place depuis des années et de leur apporter son soutien pour les renforcer ? cycle-d-expositions-2009-2017-a-la-galerie-du-bailliage-d-aire-sur-la-lys-2.pdf (121.38 Ko)

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Détail de la sculpture de l'Hôtel de ville d'Aire-sur-la-Lys représentant la Force

 

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